Quand nous avons rencontré Hocine Abdi à l'ASTI1 il y a vingt ans, nous nous sommes dit Jean Marie et moi : « Voilà un homme algérien qui n'est pas victime de sa vie mais acteur ». Je redis la même chose aujourd'hui. Jean Marie n'est plus mais il m'accompagne dans ma réflexion et je déclare avec fierté : « Hocine est acteur de sa vie ». Son livre relate certes son histoire mais aussi celle de son pays. Ce n'est pas rien que de relier les choses. Peu de gens savent le faire. Déjà dans l'aventure de l'émigration, Hocine savait nous parler de la Kabylie si riche en organisations villageoises et de son expérience syndicale chez Renault. Dans ce livre, il fait un tour plus vaste, généreux, nous relatant les grandes épopées et les résistances de tous les temps et du nôtre. Après un retour dans son pays d'origine en 1986, Hocine et sa famille sont revenus en France, qui est aussi leur pays. Surtout celui de ses enfants qui y sont nés et qui le revendiquent. Que cet horizon plus large duquel nous parvient ce texte, nous permette encore une fois de nous écouter des deux rives de la Méditerranée, afin que naisse un autre monde. Marie Thérèse Arbona
Un document d'histoire. On vit la clandestinité. La révolte des Résistants et leurs choix de s'opposer à la loi dictée par l'occupant. De l'appartement d'Issy-les-Moulineaux, au Palais d'Orsay, on suit l'arrestation et l'interrogatoire. Ensuite, l'auteur nous immerge dans le milieu carcéral de la prison de Fresnes. Avec Éliane et ses compagnes, on se retrouve au camp de triage de Royallieu près de Compiègne, puis dans le train qui part en Allemagne, avec ses sinistres wagons à bestiaux. Le convoi compte 27 000 femmes. L'épreuve de dégradation humaine commence par la soif. Elle se poursuit par l'arrivée à Ravensbrück. On est partagée entre l'horreur (92 000 femmes y périrent) et la foi d'une chrétienne qui éclaire l'épreuve imposée par la machine à broyer les individus, instituée par le système nazi. Puis, c'est le récit quotidien et pudique d'une aventure hallucinante. La vie d'une déportée de base à Holleischen. La déchéance humaine qui fait son oeuvre. On ne peut pas, on ne doit pas ignorer ces êtres transformés en fantômes vivants. On admire la dignité de ces femmes aux corps humiliés mais dont l'âme survivra à toutes les épreuves. Le lecteur découvrira la solidarité de ces « dames » qui est l'une des formes les plus pures de l'Amour.